Haut

L’Histoire a-t-elle été falsifiée?

01/06/1989 Article en PDF téléchargeable


La politique est l’ennemi de l’Histoire. La première impose souvent sa loi à la seconde. Quand les conditions s’y prêtent dans un pays, l’histoire devient une arme politique. Elle est utilisée pour créer des mythes vivants et, par conséquent, elle tord le cou à des faits réels. L’Union Soviétique, jusqu’à récemment et maintenant qu’en est-il?


DE SAYAH A SLIMAN BEN SLIMAN

 

L’Histoire a-t-elle

été falsifiée?

 

La politique est l’ennemi de l’Histoire. La première impose souvent sa loi à la seconde. Quand les conditions s’y prêtent dans un pays, l’histoire devient une arme politique. Elle est utilisée pour créer des mythes vivants et, par conséquent, elle tord le cou à des faits réels.

L’Union Soviétique, jusqu’à récemment  et maintenant qu’en est-il? La Chine, la plupart des pays de l’Est, la presque totalité des pays du Tiers-Monde appliquent, sur une grande échelle, la chirurgie esthétique à l’Histoire.

En Tunisie, l’Histoire a déjà souffert des caprices de la politique. Nombreux sont ceux qui ont pensé et pensent toujours que l’histoire de la Tunisie contemporaine a été falsifiée. Certains en ont la preuve. Très peu de témoins ont parlé avant le changement du 7 novembre. L’un des rares à l’avoir fait avec courage, a été feu Mahmoud Matri.

Lors d’un discours prononcé le 3 septembre 1972 à Monastir, le président Habib Bourguiba avait accusé Dr Matri, qui fut président du Parti, d’avoir été chargé par le résident général d’essayer de convaincre Bourguiba d’arrêter ses tournées dans le pays.

Dr Matri a rédigé une réponse sous forme de « lettre ouverte à Bourguiba » qu’il a envoyée au journal « L’Action ». Le journal a dans un premier temps refusé de la publier. L’ancien président du PSD, dont une précédente initiative similaire auprès d’un autre journal tunisien s’était heurtée au même véto, menaça alors de publier sa réponse dans le journal «Le Monde». On a alors considéré, en haut lieu, qu’un moindre mal était de la publier en Tunisie. Elle l’a été dans « L’action » du 17-18 septembre 1972. Bahri Guiga autre grande figure du Mouvement national a, quant à lui réagi autrement  à la confisquation de l’histoire de ce mouvement par Bourguiba. Il s’est réfugié dans le mutisme le plus total, attitude qu’il observe encore. Mais certaines personnes qui l’ont approché disent qu’il serait en train d’écrire ses Mémoires. L’histoire nationale en a grandement besoin ! Slimane Ben Slimane les a écrites. — ainsi que Mahmoud Matri dont les Mémoires ne tarderont pas à être publiées par ses héritiers qui sont en train d’y apporter les dernières touches. Et son fils les a fait publier.

 

 

« REALITES »N° 197 DU 26 MAI AU 1ER JUIN 1989

Leur publication a provoqué la réaction de maître Ammar Dakhlaoui dont le nom est cité dans le livre de Slimane Ben Slimane. Me Dakhlaoui qui accuse ce dernier de mensonge a porté plainte pour diffamation.

Réalités a saisi l’occasion qu’offre cette controverse pour ouvrir le dossier de l’histoire de la Tunisie contemporaine. Pour ce faire, nous avons interpellé de nombreux historiens, témoins et acteurs de l’histoire. Dont en particulier M. Mohamed Sayah que beaucoup accusent d’avoir falsifié l’Histoire. Bien qu’il ait refusé, « pour le moment », d’accorder une interview — en nous promettant que sa première interview sera accordée à Réalités l’ancien Ministre a accepté volontiers de discuter avec nous de son expérience de mémoriste de Bourguiba. Qu’en pense-t-il ? D’abord, il ne revendique pas la qualité d’historien. Ensuite et surtout il ne renie rien et assume totalement la responsabilité de ce qu’il a fait.