L’HISTOIRE DU MOUVEMENT NATIONAL
L’affaire Dakhlaoui-Ben Slimane
Glissant! C’est
le moins qu’on puisse dire de ce terrain, celui de l’histoire du Mouvement
national... Un livre, un témoignage, sous forme de mémoires posthumes vient de
remettre «à
Et voilà que, quelques semaines seulement après sa parution, éclate la première « affaire », celle de Me Ammar Dakhlaoui, avocat et nationaliste connu, acteur également de l’époque dont parle Dr Ben Slimane ... Que s’est-il donc passé? Me Dakhlaoui s’est senti diffamé par les propos que le Dr Ben Slimane tient à son sujet. Le Dr Ben Slimane n’a pas mâché ses mots en traitant Me Dakhlaoui de personnage « louche » « d’informateur de la polices » de « compagnon douteux » de Salah Ben Youssef...
Dans le dossier qui suit, les protagonistes de l’affaire parlent, expliquent ou se défendent. Pour des empêchements professionnels, M. Moncef Ben Slimane nous a promis sa contribution prochainement...
A.L.B
Me DAKHLAOUI REPOND
A SES DETRACTEURS
« LE MORT SAISIT LE
VIF »
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« Croyants, si un homme de
mauvaise réputation vous apporte une nouvelle, prenez soin d’abord d’en
vérifier la teneur. vous risqueriez, autrement, de causer du tort à des
innocents par inadvertance; ce dont vous auriez ensuite à vous repentir ».
(Traduction Mazigh).
M’estimant diffamé par le livre de feu Slimane
Ben Slimane, j’ai saisi la justice à l’effet de la voir trancher le litige,
suivant le droit et la conscience des magistrats J’attendais donc, sereinement,
l’audience fixée à cet effet, lorsque je constatai, dimanche dernier, que les
mis en cause, prenant les devants, ont choisi, d’abord, la place publique pour
entamer
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le combat et préparer leur défense, D’où les
honneurs de la première page du journal «
Si l’on en croit donc Monsieur
Mahfoudh (lui-même intellectuel distingué au-dessus de tout soupçon, bien assis
sur un fauteuil fort confortable et combien mérité)...
Si, mû par un ressentiment
quelconque en écrivant mes Mémoires je signalais à la postérité qu’un certain
éditeur ou un certain journaliste n’était pas ce que le commun des mortels
pense de lui, puisque je l’aurais accablé de tous les péchés d’Israël. Si un
jour, mes héritiers publiaient ces fausses et infâmes accusations à l’encontre
de cet honorable éditeur ou journaliste, Monsieur Mahfoudh semble admettre que
mes mémoires s’inscriraient dans la logique « d’une liberté d’expression
légitime
Je suppose donc que de par leur âge
et leurs fonctions (anciennes et récentes) Mohamed Ben Ismaïl et Mahfoudh ne
connaissent qu’un seul côté de l’histoire puisqu’ils se sont permis de se contenter
d’une seule voix discordante d’un « militant » qui a été chassé du Parti en
1950 et qui n’avait jamais digéré la confiance que m’accordait Salah Ben
Youssef, secrétaire général de Néo-Destour et de la position privilégiée que
j’avais auprès de celui-ci et des autres leaders.
Comme il a été écrit ailleurs,
j’apporte donc le plus méprisant démenti aux ragots débiles et aux assertions
fantaisites issus de cerveaux ravagés par la haine et la jalousie »
Mise au point
Monsieur Mahfoudh qui est un
intellectuel au-dessus de tout soupçon, n’est pas néanmoins un juriste. Mais il
sait cependant qu’en matière de diffamation, il appartient au diffamateur
d’apporter la preuve.
Or, ni le diffamateur (Dieu ait son
âme !), ni son digne héritier, ni son éditeur ne seront capables de justifier
mensonges et calomnies.
Cependant, le vieux diction
proclame : « Calomniez, il restera toujours quelque chose... »
Quoi qu’il en soit il, le scandale
soulevé par ces élucubrations posthumes a tellement choqué les gens de bonne
foi et d’expérience, qu’il en est résulté une bonne affaire pour l’éditeur et
son client...
En page 3 de Tunis-Hebdo de lundi
dernier, sous le titre « Salman Rushdie déjà en enfer », il est écrit «
D’ailleurs, sans ce scandale, ce livre ne serait rien. Plus tard Salman Rushdie
se rendra compte qu’il a été le bourricot sur le dos duquel un certain éditeur
a transporté une fortune »
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Quant à moi, une certaine gêne
m’empêche de proclamer mes faits d’armes connus de tous les résistants inscrit
au parti depuis 1931 (Jeunesse libérale), arrêté le 13 septembre 1935 et
assigné à résidence dans un bled perdu pendant huit mois.
D’Alger, le Gouverneur général Le
Beau prit contre moi et contre Maître Férid Bourguiba un arrêt d’expulsion en
juin 1941.
Arrêté le 11 mai 1943, et incarcéré
à la prison militaire, je fus libéré, 15 jours plus tard, sur intervention de
John Utter, vice-consul des USA, habitant Sidi Bou Saïd. Je commençais une
carrière fulgurante au service de tous les résistants, dont les premiers furent
accusés de collaboration avec l’ennemi.
Le Congrès de l’indépendance
Il était préparé depuis des mois,
de sorte que la police française n’avait pas besoin d’un informateur pour
connaître le local de « Tronja ». D’ailleurs j’arrivais au congrès dans la
voiture de Salah Ben Youssef et en même temps que lui.
D’où les insinuations perfides de l’auteur
des Mémoires que mon intimité avec son patron Ben Youssef faisait enrager. Le
public appréciera la valeur d’une prétendue lettre au destinataire français
inconnu et qui aurait été déchirée pour plaire à ce co-détenu.
Ce dernier s’étant bien gardé de parler de
l’incident suivant, je vous le relate aux fins que vous jugez utiles : A la
suite de l‘intrusion de la police dans la maison où se déroulait le congrès le
23-8-46, nous fûmes une cinquantaine à avoir été arrêtés et conduits, en
camions dans la salle d’audience du tribunal militaire, gardée, au dehors, par
des militaires sénégalais qui avaient placé dans la cour, leurs fusils en
faisceaux...
Cette situation qui se prolongeait semblait
inquiéter quelques uns puisque vers 3 heures du matin, un certain docteur (je
ne me souviens pas de son nom) m’aborda, le visage pale et l’air angoissé, en
ces termes : « Toi, un habitué du tribunal militaire, pourrais-tu m’expliquer
cette situation ? Nous sommes enfermés dans une salle d’audience, avec des
soldats en armes.
J’eus alors la malencontreuse idée — et je le
regrette après coup— de lui répondre ceci : « Ils nous ont mis dans cette salle
d’audience pour nous faire juger. Ils sont donc allés réveiller les officiers
qui vont se constituer en Cour martiale, probablement pour nous condamner à
mort et nous faire exécuter, tout de suite après, par ces soldats puisque les
arrêts de la cour martiale excluent toutes voies de recours ! ». Qu’ai—je fait,
mes amis?
Mon interlocuteur est allé au petit coin au
moins dix fois dans la soirée. Dieu me pardonne
Et puis il faut croire qu’un excès de courage
rend suspect. S’il y a des délits d’excès de vitesse, il existe des crimes
d’excès de courage, plus dangereux.
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Je ne vais pas faire éditer un livre de
citations mais je renvoie l’éditeur, son client et son défenseur de journaliste
auprès de ceux qui avaient bénéficié de l’aide et de l’assistance de
l’adversaire du jour des diffamateurs, qu’ils s’adressent à la vraie histoire
des héros qui avaient nulle fois risqué les douze dalles, dans la lutte contre
l’occupant !
Demandez à Salah Bouderbala. Le Fouquier-Tinville
du Tribunal révolutionnaire de mai 1953. Son nom de guerre était Lawrence. Demandez
à Béchir Zarglayoun, à Ezzeddine Fourati, à Béchir Ben Youssef, à Mohamed Masmoudi,
Ahdelhafidh Naoui, Moncef Mazigh, Naceur Ben Sassi Dhaou. Mohsen Zafzouf.
Noureddine Ben Jemii. Demandez à Azzouz Rebaï, à sa femme Esma, à Ezzeddine El
Abbassi, à Habib Achour, à Ali Chéour, à Tahar Amira. Demandez à Habib Grar, à
Ahmed El Bey... Vous ne pouvez pas le demander aux morts comme Hassen Amar, Hosni
Attia. Ali Ben Youssef, Mahmoud Badri et autres Ridha Ben Amar. Demandez à Ali
Lounis qui a été défendu au tribunal militaire à Constantine en juillet l945. Demandez
aux historiens du Chef Mustapha Boulaid défendu devant les tribunaux militaires
de Tunis et de Constantine (juin 1955). Demandez à Hamadi Ben Slama bras droit
du Mufti de Jérusalem arraché à la peine de mort et libéré après plaidoierie au
tribunal militaire de Marseille (1952).
Demandez aux héritiers Ezzeddine Rassaâ
condamné à mort en 1944 par le tribunal militaire de Tunis, arrêté à Paris où
il fut sauvé après assistance au tribunal militaire de Paris.
Demandez à Hédi Kourda, deux fois condamné à mort
par
Demandez aux détenus de la prison militaire qui
s’attendaient à faire inscrire leurs noms en lettres d’or à Séjoumi, par quels
moyens ils ont pu s’évader et qui leur avait fait remettre au péril de sa vie,
armes, scies à métaux et même chloroforme.
Demandez, demandez... Sachant que la
bave du crapaud n’atteint pas la branche colombe. Il faut quand même se
résoudre à écrire des Mémoires.