« DIALOGUE » n° 695 DU 1/2/88
DEBAT
FIGURES ILLUSTRES DU MOUVEMENT NATIONAL
Sur Les traces
de Slimane Ben Slimane
PAR
KAMEL LAARIF
Sur les connes de l’hebdomadaire du P.S.D.,
« Dialogue », mon ami Mohamed Ali Ben Hafsia a rappelé le souvenir du
Docteur Slimane. Ben Slimane, une figue éminente du Néo-Destour : cette
présentation, préliminaire bien sûr, ayant le mérite de situer sommairement le
personnage appelle des précisions et soulève un débat relatif à des choix et
orientations que celui- ci proposés au début des années1950, entraînant, à
l’époque, son exclusion du Parti, et à une activité politique dans le cadre de
«
« Dialogue » a saisi l’opportunité d’un tel débat. Il a publié des documents inédits, faisant état des réactions de certains militants à la suite de l’exclusion du Docteur Ben Slimane du Néo- Destour. Quel ne fut mon étonnement devant ce constat. La génération de militants qui a rallié le Néo-Destour au lendemain de la seconde guerre mondiale s’interrogeait déjà sur les normes de fonctionnement intérieur du Patri, ses rapports futurs avec l’Etat à investir et à remodeler, le type de société à promouvoir une fois l’indépendance acquise. Faute d’avoir des réponses en leur temps et singulièrement en raison de ce que le Docteur Ben Slimane s’est incliné devant ce qui devait représenté une occasion privilégiée d’appliquer rigoureusement le règlement intérieur, ces questions se sont posées en termes de violence et de contre -violence lors de la crise de l’autonomie interne, de déchirement lors du congrès de Sousse en 1959, de banqueroute effrénée, de vide idiologie périlleux tout au long des années 1970. L’interdiction de la presse indépendante, inscrite dans un processus de musellement entamé bien avant celui de la « Tribune du Progrès » en portant un coup dur à l’esprit de tolérance dans le pays, a achevé de cantonner le Parti dans l’espace étriqué d’une structure d’approbation aveugle.
Si aujourd’hui notre besoin de vérité
procède d’une louable volonté de réhabilite tous ceux qui ont apporté, au prix
de souffrances et de sacrifices de touts sortes, leurs concours à la libération
de la partie et à l’édification de
I.
Ben Slimane, l’Etoiliste
S’agissant de Slimane pourtant figure de premier plan du mouvement national tunisien, voire maghrébin, nous constatons que ni son combat, ni même sa vie personnelle n’ont échappé à la controverse. Si, globalement, les étapes majeures de son combat au sein du Néo- Destour et notamment ses prises de positions à la veille de l’ultime bataille de libération et au lendemain de l’indépendance sont notaires, d’autres épisodes de son parcours politique, surtout à ses débuts, ont été occultés. Plus grave encore, les données les plus élémentaires relatives à la personne ont été ignorées ou diversement rapportées.
Ursel Clausen lui attribue comme date de
naissance le 13bfévrier 1885[1].
Tandis que Sophie Bessis affirme qu’il était âgé de seulement plus de 80 ans
quand il était éteint le 24 février 1986[2]. Une
reconstitution à laquelle nous avons procédé nous a amené à donner raison à
Sophie Bessis : « il est né è Zaghoun dans les premières années du
siècle ». Ila suivi ses études secondaires au Collège Sadiki de Tunis, aux
lycées de Beauvais et d’Evreux en France puis des études supérieures de
médecine à l’Université de Paris dont il sortit avec le diplôme de Docteur en
Médecine, spécialiste en ophtalmologie. Rentré au pays, fin 1936, il sera
arrêté le 4avril 1938. Il n’aura exercé sa profession d’oculiste à Tunis que
sporadiquement, puisqu’il s’adonnait activement à des tournées de propagande à
travers
Le rôle qu’il a joué dans le cours des événements, ainsi que le stature de l’homme qui se situait à leur épicentre étaient de nature à lui éviter tout même l’oubli dans lequel il a sombré. Quand nous observons le cas qui est tapageusement fait de personnes dont le rôle a été insignifiant dans le mouvement national et qui n’ont eu que l’heur de plaire une fois les choses rentrées dans « l’ordre », on ne peut s’empêcher d’en concevoir gêne, amertume et trouble. Sophie Bessis a, raison d’émettre un doute, douloureux pour nous, quand elle dit : « il n’est pas sûr que les jeunes Tunisien aient en mémoire le nom de l’homme qui s’est éteint au matin du 24 février à plus de 80 ans… le Docteur Slimane Ben Slimane a pourtant consacré la majeure partie de sa vie à défendre son pays et l’idée qu’il s’en faisait [3] ».
Il adhéra probablement au Destour qui fut fondé en 1920, à l’instar de plusieurs jeunes intellectuels Habib Bourguiba, Tahar Sfar, Youssef Rouissi, et c., pour faire l’expérience d’une marginalisation allant de soi dans un cercle de nobles et de vieux turbans ombrageux et suffisants. Au demeurant, d’autres personnalités aux prétentions réformatrices et pourtant moins jeunes, dont Tahar Haddad, s’y étaient déjà heurtées et se sont vues jetées aux orties.
La fusion
conjoncturelle entre nationaliste et communistes
C’est dans la période parisienne alors qu’il poursuivait ses études que Slimane Ben Slimane entreprend de façon significative des activités politiques. Il ne pouvait trouver d’organisation mieux appropriée pour se jeter dans le combat politique que l’Etoile nord-africaine, qui fut fondée en mars –juillet 1926 par la fusion conjoncturelle de deux courants idéologiques différents : le mouvement communiste international et le mouvement nationaliste nord-africain.
Marqué par une double affiliation, des vicissitudes historiques tenant aux orientations infléchies tantôt par l’un et tantôt par l’autre de ces deux horizons, ce « melting pot », ou nombre de futurs leaders nationalistes maghrébins se sont cherchés, allait façonner durablement le profil politique dualiste de Slimane Ben Slimane. Celui-ci ne se départira jamais de son double ancrage national et social. Comment en eut-il été autrement alors que l’étoile nord- africaine a été le produit de la convergence de la stratégie de l’internationale communiste et des aspirations nationalistes disparates de mouvement, groupement et personnalités éparpillées à travers le monde colonisé ou semi-colonisé et les métropoles impériales.
Pour les Communistes, l’Etoile nord-
africaine devrait être une organisation nationaliste révolutionnaire appelée à
canaliser, structurer et contrôler l’aile marchante du « nationalisme
bourgeois » nord-africaine. En somme, elle devait servir de cadre à un
activisme communiste manipulateur intéressé par la mobilisation d’une masse
d’ouvriers maghrébins d’autant plus accessibles aux arguments des mentors de
l’I.C. qu’ils étaient miséreux, non syndiqués et coupés de leurs racines. Les
travailleurs algériens résidant en France
en 1925 comptaient à eux seuls 100.000 individus. C’est dire
l’importance de cette masse disponible et manœuvrable. Les raisons de cette
tactique étaient multiples : le recul après l’euphorie des débuts des
années 1920 consécutif à la répression dans les colonies et semi-colonies
(répression de
Pour leur part, les Etats-majeurs des
mouvements nationalistes, conscients de l’inégalité du combat, face à toute
puissance de la machine coloniale, ne répugnaient pas à s’accommoder d’une
collaboration que les communistes leur offraient. En dépit des divergences
idéologiques qui les séparaient de ces alliés
de fortune, les nationalistes voyaient là un moyen d’attiser la discorde dans
les rangs de l’ennemi commun. Les exemples de cette conjonction sont fort
nombreux. En Tunisien, le cheikh Abdelaziz Thaâlbi, leader du Destour tout
récemment formé, voyant tout le patri à tirer de cette alliance, incitant les
jeunes intellectuels à coopérer avec
Le Ghazi, quant à lui, signera quelques mois plus tard (mai 1921) et à l’heure même où il décapite le P.C. turc un traité d’amitié et de fraternité avec l’Etat bolchevique dont il obtiendra aide financière et armement.
Panarabisme, Panislamiste et
l’Internationale communiste
Ce sont là des illustrations de la mise en pratique par l’I.C. de son soutien aux « mouvements » bourgeois de libération qui devait pourtant être dispensé selon Lénine seulement « quand ces mouvement seront réellement révolutionnaires et quand leurs représentants ne s’opposeront pas à ce que nous éduquons et organisions les paysans et les grandes masses d’exploités[5].
Deux explosions anticolonialistes : le soulèvement du Rif conduit par l’Emir Mohamed Ben Abdelkrim Khattabi et la révolte syrienne de Sultan Atrache allaient remettre la collaboration à l’ordre du jour. L’I.C, tout en cherchant à donner une impulsion à l’expansion du communisme par le renforcement des P.C. là où ils existent et leur création là où ils font défaut, s’appliquera à prendre contact avec les chefs des insurrections nationalistes. Moscou va jusqu’à soutenir Ibn Saoûd et Amanallah Khan, roi d’Afghanistan, dans le but de jouer à fond la carte du panislamisme et d’ouvrir ainsi des brèches dans le système colonial revalorisé en tant que support supplémentaire et l’encerclement de l’URSS.
C’est dans ce contexte et alors que cette deuxième phase se coopération s’effilochait sous les attaques victoires ou colonialisme que l’Etoile nord- africaine vit le jour pour relancer le processus. A cette époque (1926), l’I.C. prônait l’adhésion individuelle des communistes aux mouvements nationalistes dans le dessein de les attirer dans sa mouvance. Selon les directions de l’I.C : « les communistes indigènes peuvent et doivent enter embryonnaires, qui existent à l’hure actuelle, tant en Algérie qu’en France, pour les faire évoluer vers les solutions politiques démocratiques que nous préconisons…le patri communiste ne doit pas avoir de rapports officiels dans l’organisation de ces patris, mais des communistes doivent y adhérer individuellement et contribuer de toute manière à leur développement, y former des fractions communistes par lesquelles on arrivera prudemment, mais sans avoir l’air de commander, à ce que la base sociale fondamentale de ces partis soit constituée par les couches ouvrières et paysannes démocratiques »[6] . Pour le déroulement d’un tel programme, l’Etoile nord-africaine représentait une plate-forme idéale, « constituée, avec l’aide et le soutien du Patri communiste française, elle avait à l’origine un programme anti-impérialiste, progressiste et démocratique ». En effet, « les ouvriers formaient l’essentiel des adhérents ; la plupart de ses dirigeants étaient membres du P.C.F.
Un rapport de police, établi en janvier 1929, nous donne la liste du Comité central de l’ENA ; sur 28 membres, 16 appartiendraient au Patri communiste »[7].
Ho-
Chi- Minh, Messali et les autres
Comme je l’ai indiqué plus haut, il n’est
pas faux de dire que l’ENA fut le prolongement
de l’union intercoloniale formée autour de Nguyen AL-Quoc (Ho- Chi-
Minh) par des immigrés indochinois et nord- africains notamment qui appartenaient
à
Telle est l’époque dans lesquelle le jeune Slimane Ben Slimane a évolué et alors qu’il n’a été encore propulsé à l’avant-scène de l’Etoile, point de confluence des principaux courants idéologique en cours . Son heure arrivera durant les années 1935-1936. Les matériaux relatifs à son rôle n’ayant pas été encore exhumés, nous avons été amenés à projeter sur son personnage les traits d’un autre leader dont il fut camarade de combat : Messali. D’abord, au contact plus que chez eux l’ampleur des inégalités entre Français et indigène. Leur prise de conscience et l’éveil de leur volonté de lutte contre ces inégalités précédent certainement d’un fond culturel commun vivace. Ensuite le communisme, par ses mots d’ordre contre l’exploitation à la fois capitaliste et coloniste, par sa quête d’embrigadement des Nord-africain toutes, leur a offert un cadre d’action tout indiqué. Expliquant les circonstances dans lesquelles des jeunes maghrébins sont venus au communisme en cette époque, Messali dira plus tard : « vous savez, au temps de l’Etoile nord-africaine, nous étions très jeunes.
Nous avions vu venir à Tlemcen, à Oran, des hommes éloquents qui
parlèrent de notre pays, de nos libertés, de nos droits. Ils s’appelaient Paul
Vaillant Couturier, Charles-André Julien »[8] .
Il faut remarquer que son adhésion auparavant à
Dans ces mémoires, Massli rapporte, en explication de son éloignement de ce mouvement, que quant il demanda : « qu’une délégation se constitue pour demander au gouvernement la suppression du Code de l’indigénat et la restitution de nos droits… cette intervention soulève encore un tollé plus violent chez les beni oui-oui .. »[9]. C’est ainsi qu’il se tourna vers le Parti communiste, surtout que celui-ci avait, à l’époque, pris fait et cause pour le soulèvement rifain. A la suite d’un passage à l’école des cadres communistes de Bobigny, il émergera comme le plus important et le plus important et le plus important et le plus actif membre nord-africain du P. C. F 1927 le retrouvera au sein de l’ENA fondée une année plus tôt par Abdelkader Hadj Ali, un ancien de Fraternité musulmane qui, lui aussi, avait adhéré au Patri communiste et fait partie de l’Union intercoloniale.
Le premier
congrès anticolonialiste réuni à Bruxelles entre le 10 et le 14 février 1927
par
Il n’y avait meilleurs profil que celui de Kha?rallah, « bourgeois » et « révolutionnaire », selon les spécifications du moment pour combler le vide. D’ailleurs, le problème du leadership n’a pas été ressenti, tant il est vrai que : « quand un parti ne réuni que quelques certaines d’adhérents, le problème du pouvoir na s’y pose pas »[10]Il n’en fallait pas davantage pour que l’ENA attire sur elle l’intérêt puis les foudres de la police française qui sévissait déjà contre un parti communiste en plein gauchiste et contraint à la clandestinité. Ce qui s’en suivit fut, d’une part, la défection des étudiants tunisiens, algériens et marocains retirés prudemment sur des positions apolitiques en ralliant l’AEMNA et, d’autre part, le plongeon dans la clandestinité des éléments prolétaires les plus irréductible.
Slimane Ben
Slimane, alias Abdul’Houda
Paradoxalement, c’est à ce moment que surgit Slimane Ben Slimane. « le futur docteur Slimane Ben Slimane est donc le seul à continuer de militer, organiquement, dans la tourmente, au sein d’une organisation « ouvrière » puisque c’est lui, selon nous, qui se cache sous le pseudonyme Abdul’Houda, lors de l’assemblée générale de 1928 ( El Ikdam) »[11]. Ne s’encombrant plus de nuances, le Patri communiste radicalisé s’en tient alors à une tactique « puriste » classe contre classe et, concernant l’ENA, décide de la reprendre en mains. L’assemblée générale de 1928 verra ainsi Kha?rallah perdre la direction du mouvement au profit de Hadj Ali, communiste bon teint, assisté par Djilani (ou Djilali) Chabila, comme secrétaire général, et son adjoint, Hadji Messali. Les traces de Slimane Ben Slimane se perdent alors. D’ailleurs, l’Etoile fut dissoute le 20 novembre 1929 mais reparaissait sans cesse sous de nouvelles appellations telles que « Glorieuse étoile nord-africaine », « Union nationale des musulmans nord-africaine »…
L’association des Etudiants Musulmans Nord-Africains (AEMNA) fondée le 28 décembre 1927 et dont le siège se trouvait 16, rue Rollin- Paris, était là pour accueillir les étudiants nord-africains ayant quitté l’ENA, comme nous l’avions relaté plus haut. Les communistes ont cherché à y assurer leur hégémonie en la contrôlant par le biais des étudiants sympathisants. Mais la majorité des adhérents de l’AEMNA, désappointés ainsi que nous le verrons plus loin par les revirements communistes, se rapprocheront progressivement de la gauche non communiste. En effet, dès 1928, l’internationale communiste s’était désintéressée de la question nationale. Son VI éme congrès tenu cette année « érigea le repli sur l’URSS et la priorité de sa sauvegarde. (…) en absolu identifié à l’internationalisation prolétarien, sacralisé en dogme de la défense de la patrie du socialisme »[12]. Ce congrès proclame en substance : « le prolétariat international dont l’URSS est la seule partie, le rempart de ses conquête, le facteur essentiel de son affranchissement international, a pour devoir de contribuer au succès de l’édification du socialisme en URSS et de la défendre contre les attaques des puissances capitalistes par tout les moyens »[13].
C’était manifestation aller à contre-courant des préoccupations
nationalistes des alliés nord-africains et particulièrement les intellectuels
parmi eux, à un moment où du fait du déchaînement colonialistes à partie de
1930. La question nationale s’était posée dans un contexte qui lui était propre
(congrès eucharistique à Carthage, 6 mai 1930 ; le Dahir berbère, 16 mai
1930 ; Centenaire de la prise d’Alger, 5 juillet 1930 ;
Cinquantenaire du protectorat française en Tunisie, 12 mai 1931). Le raidissement national qui suivit cet
enchaînement de provocations coloniales, s’il n’a pas suffit à mettre fin à la
léthargie des vieilles élites, allait provoquer une relève par les jeunes dont
ceux qui s’étaient signalés à l’ENA et à l’AEMNA. Donner raison aux communistes
dans les accusations qu’ils portèrent
alors au Wafd, à
Communistes-nationalistes
maghrébins : La bifurcation
Illustration éloquente de cette bifurcation,
le leadership de l’ENA incline de plus en plus vers Messali. Dans le grand
meeting que celui-ci organisa le 28 juin 1930, il fait déjà figure de chef. Les
divergences entre le courant messaliste et les communistes vont s’accentuer jusqu’au second congrès mondial
de
En octobre 1930, les éléments communistes
de l’ENA tentent de s’emparer de ses commandes par la création du journal
mensuel publié en langue française, « El Ouma ». Nouvelle
tentative en juin 1931 par la relance
des souscriptions réunions avec l’appui diligent du Tunisien Ahmed Ben
Miled, un transfuge de
Le renouveau de l’ENA qui se poursuivra
jusqu’à sa nouvelle dissolution le 26 janvier 1937 verra la réapparition en
fore de Slimane de Slimane. « Il
participe aux assises anti- impérialistes du 31 mars 1935, prend la parole au banque à
La reprise de l’ENA, renforcée par la naissance du Rassemblement Populaire », stimulée par l’intervention italienne en Ethiopie et la préparation du congrès islamo-européen, ramène les étudiants dans les meetings communs. Mais ils restent très prudents et n’y prennent pas la parole.
Le même scénario est donc reconduit, en plus marqué, lors de la troisième vague de pression et de répression policière, en octobre 1935. Ben Slimane n’est plus jamais le Tunisien de l’ENA. Toutefois, Hédi Nouira remarqué par ses interventions orales en diverses occasions depuis 1934, vient à son tour assister l’ENA alors que Messali et Radjef sont recherchés et que, sur demande de la direction, Imache s’est constitué prisonnier le 15 novembre 1935. Un duo tunisien accède alors à la direction de l’Etoile, pour assister le duo algérien Kehal-Yahiaoui qui fonctionne depuis la fin octobre. Le Dr Ben Slimane est en fait, au printemps 1936, le véritable porte-parole de l’ENA. Il préside l’assemblée générale d’information organisée, 18, rue Cambronne, dans le 15ème arrondissement, par l’ENA, le 26 février 1936.A deux reprises, il intervient en son nom lors de débats animés par Léo Poldès au club du Faubourg, transformé pour l’occasion, de par présence de plusieurs dizaines d’adhérents étoilistes, en véritables salle de l’ENA.
La première fois (18 mars 36) comme interpellant lors d’une conférence du Dr Ben Jelloul, auquel il rappelle sèchement les revendications du peuple algérien et l’idéal indépendantiste de l’ENA.
La seconde (28 mai 1936) comme orateur-conférencier auquel Léo Poldès a donné la parole et un droit plénier de réponse, ce qui lui permet de reprendre le discours programmatique de l’Etoile dans son intégralité. Dans ce combat entre les deux docteurs, il n’est pas exagéré de dire, pour reprendre le vocabulaire du noble art, que Ben Slimane l’a emporté par K.O. Ainsi, au moment où l’ENA est au plus quasiment en rupture de fonctionnement, les deux Tunisiens aident la direction provisoire à tenir jusqu’à la victoire du Front Populaire, à sorte régulièrement le journal, instrument essentiel de le continuité. Dès cette victoire, Ben Slimane s’efface. Comme Ben Milad en 1933, il est en passe de terminer sa médecine et il regagne Tunis l’été 1936, où il retrouve du Néo-Destour »[16].
Nous avons suivi les métamorphoses d’une
génération de jeunes maghrébins discutés courants politiques extérieurs à leur
cause et qui fini par le trouver, en partie grâce au désistement total par les
communistes de celle-ci. C’est à ce niveau que se situe l’émergence des