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Les positions de Youssef Rouissi, B

01/01/1970 Article en PDF téléchargeable


Redressement en 1987 et relance escomptée en 1988: C’est ainsi qu’on peut résumer l’état de l’économie tunisienne au cours de l’année qui vient de s’écouler et les prévisions faites pour la nouvelle année.


« DIALOGUE » N°691 DU 4/1/88

 

 

DEBAT

A LA SUITE DE L’EXCLUSION EN 1950 DE SLIMANE BEN SLIMANE DU NEO-DESTOUR

 

 

Les positions de Youssef Rouissi, Béchir Ben Yahmed,

Slaïem Ammar, Mohamed Ghénima et d’autres...

 

Redressement en 1987 et relance escomptée en 1988: C’est ainsi qu’on peut résumer l’état de l’économie tunisienne au cours de l’année qui vient de s’écouler et les prévisions faites pour la nouvelle année.

La première caractéristique qui a marqué notre économie tout au long de l’année précédente a été le résultat de la conjugaison des efforts de toutes les forces vives de la Nation consistant notamment à maîtriser la demande intérieure et promouvoir l’exportation, tout en engageant des réformes structurelles visant à améliorer l’environnement de l’entreprise et sa compétitivité, le tout en vue de redresser les équilibres financiers, notamment extérieurs, qui se sont sérieusement détériorés en 1986, et de renforcer les conditions permissives de la croissance.

La deuxième caractéristique relève de l’espoir porté sur l’année 1988 pour qu’elle soit l’année de relance de l’investissement et de l’activité économique d’une manière générale qui a été éprouvée par les exigences du redressement représentées par la maîtrise de la demande et ses impacts sur les activités tournées vers le marché intérieur, en particulier, le bâtiment et l’industrie manufacturière hors textile et engrais chimiques, sur la propension à investir et l’emploi.

 

ECONOMIE 1987-88

Du redressement à la relance

 

A la suite de la parution de l’étude consacrée au Docteur Slimane Ben Slimane dans notre numéro de la semaine dernière, nous avons pu avoir accès à des documents inédits se rapportant aux réactions provoquées, au printemps de 1950, par son exclusion du Néo-Destour. Il s’agit de lettres manuscrites qui ont été adressés au militant et dans lesquels leurs auteurs prennent position contre la décision du Bureau Politique et témoignent leur sympathie au Docteur Ben Slimane qui en était l’objet.

 

 

CENTRE-OUEST

Désenclaver d’abord

 

Avec une pluviométrie de 200 et 400mm, par an, les habitants de Kasserine ne se sont pas trop aventurés dans l’agriculture. Aujourd’hui, il s’agit de lutter sur deux plans : fournir les moyens matériels et changer les mentalités. Côté industrie, à part l’alfa, il n’y a presque rien. Comment se profile donc l’avenir de la région ?

 

 

 

 

 

A LA SUITE DE L’EXCLUSION EN 1950

DE SLIMANE BEN SLIMANE DU NEO-DESTOUR

 

Les positions de Youssef Rouissi, Béchir Ben Yahmed,

Slaïem Ammar, Mohamed Ghénima et d’autres...

 

 

A la suite de la parution de l’étude consacrée au Docteur Slimane Ben Slimane dans notre numéro de la semaine dernière, nous avons pu avoir accès à des documents inédits se rapportant aux réactions provoquées, au printemps de 1950, par son exclusion du Néo-Destour. Il s’agit de lettres manuscrites qui ont été adressées au militant et dans lesquelles leurs auteurs prennent position contre la décision du Bureau Politique et témoignent leur sympathie au Docteur Ben Slimane qui en était l’objet.

 

Au-delà du caractère conjoncturel de ces documents, ce qui est particulièrement frappant, c’est le ton jeune et franc qui les traverse et qui atteste, on ne peut plus clairement, de l’existence au sein du Néo-Destour, durant toute la période de libération nationale, d’un courant de pensée que l’on peut qualifier de « gauche » et qui justifiât, pour une large part, la vocation de rassemblement du Néo-Destour. Cette vocation que le Docteur Slimane Ben Slimane a tenu à préserver, même après son exclusion, en se maintenant dans une attitude de militant destourien, responsable et discipliné et en refusant de répondre à l’appel de jeunes étudiants tunisiens destouriens de France qui y avaient vu un véritable Leader en lui faisant savoir qu’ils se tenaient à sa disposition et qu’ils « attendaient ses ordres » pour savoir quoi faire.

Parmi ceux qui avaient écrit à Slimane Ben Slimane, iI y avait aussi Béchir Ben Yahmed, Youssef Rouissi, Slaïem Amar, Mohamed Ghénima, Hussein Triki, Hassen Kammoun, et d’autres...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DU CAIRE, LE 25 MAI 1950,

YOUSSEF ROUISSI:

 

 

«Votre exclusion est contraire à la réglementation intérieure du Parti »

 

 

Je m’excuse de ne t ‘avoir écrit plus tôt pour les raisons que tu sais et à cause des multiples problèmes auxquels je fais face, particulièrement après la disparition de notre cher regretté Habib[1].

J’avais lu, dans la presse tunisienne, les mesures curieuses et la manière surprenante avec laquelle elles ont été pries, contre vous, par le Bureau Politique. J’ai demandé à Mongi, et il était alors encore au Caire pour la mission dont le Bureau Politique l’avait chargé. Il m’avait dit que tu avais présenté ta démission pour les raisons que tu as invoquées dans ta lettre au frère Houcine[2] et qu’il n’était pas au de l’évolution ultérieure de l’affaire. Je lui ai demandé entre autres de m’envoyer, dès son retour, le texte de la décision prise contre toi par le Bureau Politique et de m’en  faire connaître les raisons. J’ai aussi demandé qu’il fasse parvenir au Bureau Politique ma réprobation et que celle-ci soit enregistrée dans le compte-rendu de l’une de ses réunions réprobation de la manière avec laquelle plusieurs décisions importantes ont été prises, sans que tous les membres en soient informés.

 

 

 

A la Direction du Néo-Destour - Tunis

 

Un groupe de « mécontents » a pris l’initiative d’une lettre de solidarité au Dr Ben Slimane à la suite de son exclusion. Ces camarades destouriens— une vingtaine — (Ils ont tenu dans un souci d’intérêt général à circonscrire leur action) expriment l’opinion d’une grande partie d’autres qui se sont abstenus simplement pour des raisons d’opportunité sinon d’opportunisme. Ils ont décidé en dernière heure de s’adresser, une ultime fois, à leur parti pour le supplier de « faire quelque chose » pour dissiper le malaise mis à jour par l’exclusion du Dr Ben Slimane, qu’ils interprètent comme l’expression d’une politique anticommuniste qu’ils croient stérile puisque aboutissant, d’une part, à la paralysie de toute action dans le domaine extérieur, d’autre part à l’affaiblissement de l’opposition à l’intérieur. Aux surplus, cette politique ne peut qu’amener des adeptes au parti communiste et de l’eau à son moulin.

Ils pensent que le Dr Ben Slimane aurait pu promouvoir une aile gauche agissante à l’intérieur même du Destour et qui  pour ne parler que du point de vue tactique tout en le protégeant contre la surenchère d’extrême gauche lui aurait valu la sympathie et l’appui du bloc oriental en même temps que la sollicitude anglo-saxonne. En tout cas, le Destour aurait été ainsi dans la ligne de son slogan : Nous sommes avec ceux qui nous aiderons à nous libérer.

 

 

 

 

 

 

 

 

DE PARIS, AVRIL 1950, BECHIR BEN YAHMED:

 

« Notre motion exprime notre révolte »

 

PARIS, AVRIL 1950

Au Docteur Slimane Ben Slimane – Tunis

 

Excusez-nous de vous apporter un peu tard l’expression de notre solidarité, C’est que nous, sincères, donc tiraillés aussi bien que révoltés.

Notre motion veut exprimer, avec notre révolte, l’opinion de la majorité des étudiants tunisiens qui s’intéressent au sort de leur pays. Si elle n’a pas recueilli toutes les signatures, c’est qu’on peut toujours trouver des excuses à ne pas signer ce que l’on pense. Le divorce entre la pensée et l’action ne nous est pas particulier.

On nous a objecté que nous ne pouvions envoyer cette lettre et rester au Destour; notre réponse fut que nous restions dans une organisation imparfaite plutôt que de la quitter pour le néant, mais que nous acceptions le risque de l’exclusion.

On a fait valoir l’arrivée imminente de Bourguiba qui nous convaincrait. Nous sommes restés sceptiques aussi bien sur l’arrivée que sur le corollaire.

Tels sont les arguments d’opportunité qu’on a pu nous opposer. Il reste que, du comité de la cellule aux militants plus ou moins avertis, nous sommes acquis à vos idées — à ce que nous savons de vos idées — et mécontents de l’action et de l’inaction du Bureau Politique. Nos griefs, hélas, n’ont fait, depuis, que s’accentuer, car il y a eu, depuis. « L’indifférence» à l’égard du Dixmude dont la cargaison se chargera un jour de nous livrer à domicile les balles de la reconnaissance ; il a eu le télégramme de condoléances, que j’ai sous les yeux, exprimant la « douleur » du Parti de la Nation au parti de J. Moch. Naegelen, Nous...

Ramadier et Gouin pour la « grande perte humaine » que constitue L.Blum, apôtre, en son temps, de la politique d’autorité particulièrement en Tunisie. Nous ne sommes pas naïfs, nous savons bien que la duplicité est une qualité... politique, mais est-ce celle-là, qui décidera M. Shuman (MRP) à laisser passer le fameux « train de réformes » ? Train qui ne peut être d’ailleurs qu’une charrette qui grince… et n’avance pas depuis le temps qu’on nous en parle.

Voilà, j’ai essayé de vous décrire notre état d’esprit, à vous la parole, si vous jugez bon de nous répondre :

BECHIR BEN YAHMED

78, Bd. de Courcelles

Paris 17e

 

P.S : Avec notre motion de solidarité, nous vous envoyons ci-joint la lettre que nous avons adressée à la direction du Destour, à laquelle nous avons en même temps donné connaissance de la motion. Ainsi vous êtes complètement renseigné.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DE PARIS, LE 1 MAI 1950, BECHIR BEN YAHMED:

 

«Ce que j’ambitionne pour mon pays c’est un travaillisme à l’anglaise»

 

PARIS, LE 1er MAI 1950

Cher Docteur,

 

 J’ai reçu vos deux lettres ainsi que les journaux, j’ai fait de mon mieux pour les porter à la connaissance des camarades susceptibles d’être intéressés et je leur ai demandé de vous écrire directement pensant qu’ainsi vous vous rendrez mieux compte de leurs points de vue.

Mais nous avons été tous touchés par votre sollicitude, votre franchise et votre courage, en dépit de la lutte que vous avez à soutenir contre le mal physique, nous espérons tous que vous triompherez de la maladie comme des autres difficultés et vous souhaitons donc un bon rétablissement.

D’autre part Si Lahbib, avec le prestige et le brio que vous lui connaissez, a su— comme il s’en flattait — apaiser beaucoup d’inquiétudes, assez superficielles pour se laisser facilement apaiser. Il a fait résonner la corde toujours sensible du nationalisme pur, intégral. Mais d’après tout ce qu’il a dit, il semble que son but premier et final soit l’indépendance politique : « Nous ne pouvons pas vivre sans une patrie », a-t-il déclaré.

L’indépendance, qu’il ambitionne, se matérialise, par exemple, dans l’octroi ou le refus d’un visa d’entrée ou de sortie.

Que ferons-nous de ce pouvoir politique, une fois que nous l’aurons. Comment, par qui et pour qui sera-t-il utilisé ? Quelles garanties avons-nous de ne pas changer seulement d’exploiteurs ? Voilà ce qui nous préoccupe et ce qui semble hors de ses soucis immédiats.

Bien entendu, son système se tient, dans la mesure où se tiennent le système et le régime de Tito : Pas d’hostilité envers les USA, pas de collusion avec l’Est, car il ne faut pas que lorsque l’étape actuelle étant dépassée, nous nous organiserons en opposition violente et spectaculaire (c’est l’élément nouveau qui a conquis les étudiants, d’autant mieux — si on veut être méchant — qu’ils seront les spectateurs lointains), il ne faut pas que la France puisse nous écraser, nous décapiter en prétendant être aux avants gardes de la lutte anticommuniste.

Ainsi  à condition que le Destour s’organise et que l’échéance de janvier 1952 se réalise si la France ne vient pas à composition, la voie serait, en entretenant une agitation spectaculaire de faire intervenir les assises internationales et les USA à l’instar de ce qui s’est passé pour l’Indonésie.

Les USA et la Grande-Bretagne prendront en mains les rouages économiques ? Mais n’en sera-t-il pas ainsi de toute façon ? Y a-t-il au monde un pays qui n’est pas satellite de l’Orient ou de l’Occident ?

J’avoue que pour moi, l’argument de la répression a du poids. Vous vous rappelez peut-être que lors de notre conversation le jour de la rentrée de Si Lahbib lorsque vous m’avez exposé votre politique du soutien du bloc oriental je vous avais déjà objecté: « Vous offrirez ainsi une cible facile à la répression » et vous m’aviez répondu alors par un mot très simple et très beau qui m’est allé droit au cœur: « C’est notre métier ».

Mais le problème est de savoir si on peut raisonnablement courir ce risque de répression qui peut  par la faute du Bureau Politique  donc un peu de la vôtre être une décapitation et un arrêt comparable à celui de 1938-42 puisque vous n’avez pas su faire participer activement les cadres militants afin qu’il s’en dégage des remplaçants. Vous avez vu que le massacre de 80.000 Malgaches, celui de 40.000 Algériens, outre qu’ils sont passés inaperçues ont décapité ces deux pays.

Reste le problème de « guerre ou paix » qui est au cœur de vos préoccupations : Vous partez du fait que la menace de guerre est très grande. « La paix ne tient plus qu’à un fil ». C’est plus fort que moi, mais j’ai peine à y croire : c’est un sentiment mais il est basé sur des évidences : Il ne fait de doute pour personne qu’une nouvelle guerre serait un suicide collectif, or les Américains moins que personne ont le goût du suicide ou même de l’aventure.

Ni une crise économique, ni le rétrécissement de la peau de chagrin qu’est leur zone d’influence, ne leur feront courir le risque de la destruction.

Reste l’éventualité d’un incident plus ou moins sollicité, genre blocus de Berlin ou Privatur ou affaire yougoslave. L’issue de ces 3 affaires montre que les incidents n’ont jamais été que des prétextes et que du moment que l’on ne veut pas la guerre ou qu’on ne l’accepte pas, on ne s’en émeut guère. Je vous envoie, ci-joint, un article de Claude Bourdet qui, à mon avis, résume assez bien la situation.

Il n’en reste pas moins, qu’à mon avis, notre adhésion au Comité de la Paix est nécessaire, ne serait-ce que pour réaliser l’unité nationale et anticolonialiste. Je ne comprends pas que la peur irraisonnée des communistes et des susceptibilités personnelles empêchent en Tunisie la formation d’un front comparable à l’admirable Viêt-Minh.

Les dirigeants du P.C.T. ne me semblent pas, de leur côté, à la hauteur. Je n’en connais et d’assez loin que M. Ennafaâ que j’ai eu comme professeur, ni son caractère, ni son dynamisme ne semblaient le promettre aux responsabilités qui pèsent sur lui.

Ce que j’ambitionne pour mon pays, c’est un travaillisme à l’anglaise appuyé sur une économie planifiée, un régime coopératif, un système fort, de justice sociale et de liberté. Je sais que c’est un compromis, que par suite il est a priori suspect. Je sais que c’est difficile à réaliser... Je sais aussi que vous n’aimez pas l’Angleterre, moi non plus, mais la question n’est pas là. On ne peut dénier en tout cas que l’Angleterre est le seul pays libre entre les deux grands.

Et puis, sommes-nous un pays, un peuple capable de communisme ?

Telles sont les faibles cogitations d’un amateur qui divague d’un système à l’autre, qui a conscience qu’il « flotte », qui en souffre et qui ne demande qu’à sortir de son désarroi et à s’engager, car il est sincère, c’est sa seule vertu. Avec tout mon dévouement.

 

BECHIR BEN YAHMED

78, Bd. de Courcelles

 

 

 

 

DE PARIS, LE 22 MAI 1950, BECHIR BEN YAHMED :

« L’orage étant passe, la rivière est rentrée dans son lit »

 

PARIS, 22 MAI 1950

Cher Si Slimane,

 

Je réponds à votre dernière, avant qu’il ne soit trop tard, surtout au sujet de la publicité que vous voulez donner à notre motion de solidarité.

 

J’ai contacté certains de mes camarades qui l’ont signée. L’orage étant passé (et Si Lahbib aussi), la rivière est rentrée dans son lit et les eaux ont repris leur cours. Feu de paille et attirance des ornières à la fois... quelques-uns se désintéressent du sort de cette motion, d’autres ne veulent pas qu’elle paraisse sur des journaux communistes. Avec quelques-uns, je pense que lorsqu’on a déclaré, notamment, « Vous font confiance », on n’a pas le droit de se rétracter. Je suis d’avis au surplus que vous n’avez aucune autorisation à nous demander que moralement, logiquement et juridiquement ce document vous appartient. Vous en ferez ce que vous croirez bon de faire. Dans le cas (improbable) où quelque hurluberlu viendrait à désavouer, il ne désavouerait que soi-même et sa signature.

Je n’ai pu toucher personnellement le jeune Habib Bourguiba, aussi je lui ai envoyé un mot, j’espère que vous aurez bientôt de ses nouvelles.

Je termine par mes vœux les plus sincères de bonne santé

Bien à vous

BECHIR BEN YAHMED

 78, Bd de Courcelles

 

 

 

DE BORDEAUX, LE 28 AVRIL 1950, LES ETUDIANTS TUNISIENS:

«Nous sommes prêts à exécuter tous vos ordres»

 

 

 

Avant appris votre exclusion du « Néo-Destour », nous avons chargé notre camarade Ghénima de vous écrire. Nous étions alors les représentants du Parti Néo-Destour à Bordeaux.

Convaincus par la nécessité de mettre fin à la prétendue neutralité à l’égard des deux blocs, nous avons notifié notre démission à la Cellule de Paris et exposé notre cas à nos camarades.

Vous avez certainement reçu par la même occasion une motion de solidarité que nous avons fait signer, par tous les étudiants tunisiens, à l’exception de deux. En conséquence, nous vous prions de bien vouloir rectifier l’expression « unanimité » figurant dans la motion.

Nous vous informons, d’autre part, que nous avons décidé d’envoyer à nos camarades de Paris et de Province des exemplaires de l’article définissant votre position et que vous avez bien voulu nous envoyer.

Nous tenons particulièrement, cher Leader et compatriote, à vous assurer de notre entier concours et vous déclarons que nous sommes prêts à exécuter tous vos ordres.

 

RACHED HAFSIA

173, Rue Français de Sourdis

Bordeaux

 

 

 

 

PARTI LIBERAL CONSTITUTONNALISTE

TUNISIEN

158, RUE BAB SOUIKA

— TUNIS —

TUNIS LE 18 MARS 1950

 

 

Mon cher Slimane,

 

Comme suite à notre conversation d’hier soir, j’ai l’honneur de te faire connaître que le Bureau Politique du Parti a décidé de cesser sa participation au Comité pour la Paix et la Liberté, en raison des attaques répétées contre la politique du Parti.

En conséquence, je te prie de me faire connaître si tu es décidé à exécuter cette décision et à te retirer de ce comité. L’équivoque a trop duré et tu as été d’accord avec moi pour estimer qu’il est temps de la faire cesser.

Bien cordialement,

BOURGUIBA

 

 

 

 

 

DE PARIS, LE 29 AVRIL 1950, HASSEN KAMMOUN:

«C’est seulement les communistes français qui pourront être notre appui »

 

 

PARIS, LE 29 AVRIL 1950

Cher Si Slimane

 

« Votre exclusion » a provoqué un choc parmi la majeure partie des étudiants tunisiens de l’Association. Individuellement et par paquets, on commente, on s’élève contre une telle mesure. On écrit des lettres collectives et on recueille des signatures. Mais il n’y a pas de coordination d’idées, ni de prises de position susceptible de montrer une élite intellectuelle capable de quitter le chemin déjà battu et de se rallier à une idée ou à une théorie que beaucoup d’entre nous approuvent.

Certains responsables de la Cellule ont hésité à prendre position avec vous. Ils ont préféré attendre l’arrivée de Si Habib et lui demander des explications. Si Habib est arrivé. Réceptions enthousiastes, évidemment, visites, discours, conférences. Certains ne l’ont pas vu depuis 1938. Et ceux-là mêmes qui protestaient contre la mesure qui vous a frappé ont déclaré avoir été frappés par la sincérité de cet homme et sa bonne foi.

Je ne dis pas cela pour vous décourager. Vous connaissez beaucoup mieux que moi le Tunisien en tant que « sujet d’expérience de laboratoire ».Tout le monde pensait que Bourguiba ferait parler de lui à Paris et que le gouvernement le recevrait comme Ho-chi-Minh...

Je ne suis pas contre les pourparlers ni les contacts avec la France. Mais si nous avons à toucher ceux qui sont susceptibles de nous écouter, c’est seulement les progressistes français et principalement les communistes qui pourront être notre appui. Ce n’est certainement pas le socialiste de l’après guerre, ni le MRP qui daignera nous inviter à parler avec lui.

Si Habib prétend que le Néo-Destour est neutre. Il n’est ni pour ni contre les Russes ou les Américains. Il mène une politique neutre (??) et acceptera n’importe quelle aide venue de l’extérieur.

C’est pour cela « qu’il trouve inadmissible que le Dr Ben Slimane prenne une position aussi nette en faveur du communisme ». C’est presque toute l’explication qu’il a fournie au cours d’une réunion. Eh bien Elle a suffi à convaincre pas mal de ceux qui étaient présents. Et dire que la position pro-américaine de Si Habib est évidente.

L’esprit de cette déclaration montre bien, à lui seul, que le Néo-Destour se tourne vers l’Occident. Evidemment, toutes les régions ont acclamé Bourguiba en Tunisie, et le Leader prétend que le Destour est populaire de ce fait et qu’il constitue le Parti du peuple. Oui, mais on ne cherche pas à voir que le peuple n’a reçu aucune éducation politique ni patriotique de telle sorte qu’il reste dans l’indifférence lorsque les dirigeants du Destour marient à leur guise la bourgeoisie avec la masse, le patron avec l’ouvrier, le capital avec le salarié, la famille beylicale avec ( ) démocratiques…

 

HASSEN KAMMOUN

60, Rue de l’Arcade, Paris, 8e.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DE PARIS, LE 23 MARS 1950,

SLEIM AMMAR:

 

 

Ne comprenons pas attitude Bureau

Politique. En attendant éclaircissement

situation. Tous assurons sympathie

agissante, solidarité entière.

      

 

 

SLEIM AMMAR

Externe, hôpitaux Paris

Télégramme Numéro 44966 Tunis le 23.3.1950

 

 

 

 

 

DU CAIRE, LE 10 AVRIL 1950,

HOUSSINE TRIKI:

 

«Votre attitude conciliante résulte de votre souci de préserver l’unité de votre peuple »

 

LE CAIRE, 10 AVRIL 1950

 

 

Nous avons été surpris par la nouvelle de votre exclusion du Parti et peinés par la manière désobligeante avec laquelle on vous a écarté du Parti auquel vous avez fait don de votre jeunesse, pour lequel vous vous êtes sacrifié, auquel vous avez défendu la cause avec force et sincérité.

Je ne pourrais discuter de la légitimité de l’attitude du Leader mais quelle que soit la situation et quel que soit « le crime » dont vous êtes accusé et il est impossible que vous commettez un crime contre les principes pour le triomphe desquels vous avez sacrifié votre jeunesse.

J’ai été particulièrement peiné par les propos contenus dans le texte annonçant la décision de votre exclusion, du fait qu’ils ne sont pas dignes de votre personnalité au sein de ce parti ni de l’estime dont vous jouissez dans les cœurs de vos compatriotes. C’est pourquoi je n’approuve pas votre attitude conciliatrice lorsque vous acceptez votre exclusion sans exiger l’arbitrage du peuple par le biais d’un congrès du Parti. Je ne comprends cette attitude de votre part que résultant de votre souci de préserver l’unité de votre peuple et de ne point provoquer des discussions au sein de la nation...

Tout en vous félicitant pour votre sagesse je ne peux que déplorer la position de nos frères leaders qui ont accepté une mesure pareille dont le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle est répressive, dangereuse pour le Mouvement Destourien...

 

HOUSSINE TRIKI

Transitaire — Le Caire

 

 

 

DE KSOUR, LE 22 MARS 1950,

AHMED  M’BAREK

 

«Vous êtes et demeurez le plus immuable des Destouriens »

 

KSOUR, LE 22 MARS 1950

 

La lecture du dernier numéro « d’Al Mourid » nous apprend une nouvelle ahurissante.

L’histoire du « Néo-Destour » sera à jamais marquée d’une pierre noire. Vous ayant assez connu pour apprécier votre personnalité, reconnaître la justesse de vos jugements, la fermeté de votre caractère et la rectitude de votre conscience, je crois, de mon devoir, de vous faire part de l’extrême indignation soulevée jusqu’au sein de la population par l’incommensurable aberration du « Bureau Politique ». Que celui- ci, avec une aussi déconcertante légèreté, prenne une décision aussi lourde de conséquences, dépasse l’entendement. C’est une faute irrémédiable ! Car si nul ne peut ternir l’éclat de votre abnégation. ni amoindrir la gloire de votre passé, il ne reste pas moins vrai que dans la mesure où cette triste décision révèle un manque de cohésion entre ceux en qui on s’est habitué à reconnaître des esprits lucides et des caractères trempés, il y a un grand coup porté à l’action de libération nationale de tout un peuple. Que le Parti soit pour la Paix et craigne de le dire, c’est incompréhensible ! Que le Parti de l’action restreigne son activité à une platonique approbation des partis d’avant-garde, c’est paradoxal ! Que le Parti qui se veut le plus populaire renie, aussi all&eacut