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EDITORIAL

08/08/1961 Article en PDF téléchargeable


Toutefois, nous devons tirer les leçons du massacre de Bizerte et ne pas nous laisser abattre; nous souvenir que la lutte contre le colonialisme et ses séquelles est toujours dure. L’exemple de nos frères algériens est là pour nous le rappeler si nous l’avons un peu oublié.


Dr.BEN SLIMANE, Tribune du Progrès N°8, juillet 1961

 

Avant comme après la bataille meurtrière de Bizerte, notre devoir national et notre but restent l’évacuation.

 

Toutefois, nous devons tirer les leçons du massacre de Bizerte et ne pas nous laisser abattre; nous souvenir que la lutte contre le colonialisme et ses séquelles est toujours dure. L’exemple de nos frères algériens est là pour nous le rappeler si nous l’avons un peu oublié.

 

L’armée française qui nous fait la guerre est équipée d’armes ultra-modernes. Elle a remporté un succès militaire facile sur les civils désarmés. Les Nazis avec leurs Stukas et les blindés du Général Guderian ont également mitraillé les civils et les réfugiés sur les routes de France, désorganisé le front par leur blitzgrieg (guerre éclair).

 

Et c’est de Gaulle qui nous attaque aujourd’hui avec ses paras du putsch d’Alger qui lançait de Londres aux Français son fameux : « La France, a perdu une bataille, mais elle n’a pas perdu la guerre ». Nous, nous n’avons pas perdu la bataille de Bizerte nous gagnerons celle de l’évacuation et aucun soldat français ne restera sur le sol national.

Le peuple tunisien a connu d’autres combats durs et traversé de longues journées sombres. Mais grâce à sa résistance, il a toujours atteint son but.

De l934 à l936, il a lutté avec persévérance contre le satrape Peyrouton qui  voulait tuer dans l’œuf le Néo-Destour, renouveau du mouvement national de libération.

Après  le 9 Avril 1938, ce fut la longue résistance pendant cinq ans et enfin la victoire sur une répression féroce qui a tenté à plusieurs reprises de décapiter le mouvement national.

Et la grande bataille de toute la nation, commencée en janvier 52 a été couronnée par l’indépendance nationale.

Elle aussi a eu ses heures sombres pendant lesquelles il fallait puiser le courage et l’espoir dans le patriotisme et la foi en un avenir meilleur pour les hommes qui luttent pour la liberté et la justice.

Journées sombres des ratissages au Cap Bon par le Général Garbay, de triste mémoire: assassinats de Hached Chaker et autres patriotes tunisiens à travers toute la terre tunisienne.

Et le peuple tunisien, malgré ces épreuves, ces souffrances et ces humiliations, a toujours résisté jusqu’au bout et parmi ses fils, il a trouvé les dirigeants à la hauteur de son courage.

Dans la bataille d’aujourd’hui que faut-il pour gagner l’évacuation de Bizerte  et des territoires du Sud.

D’abord des armes pour répondre à celles de l’adversaire, le cas échéant.

Après les armes, une stratégie liée à la politique et à la diplomatie.

Nos frères algériens et vietnamiens peuvent nous être utiles. N’oublions  pas que nos frères vietnamiens ont eu leur Bizerte : Haiphong a fini par la défaite française à Dien-Bien-Phu. C’était de 1947 à 1954.

 

En 1961 le rapport des forces dans le monde a beaucoup changé. Le colonialisme agonise. Mais c’est pendant son agonie qu’il fera le plus de mal. Ses derniers  soubresauts ne le sauveront pas et il  sera achevé grâce à la lutte acharnée des peuples d’Afrique d’Asie et d’Amérique Latine, soutenu par le camp socialiste et les forces progressistes du monde entier.